Aravis septentrionales (au nord du col des Aravis )

La partie septentrionale du chaînon des Aravis, qui culmine à la Pointe Percée, est constituée essentiellement par un crêt* armé par l'Urgonien qui correspond au flanc sud-est du synclinal de Serraval - Le Reposoir.

 

Le chaînon des Aravis, devant l'enfilade des massifs subalpins franco-suisses

Vue prise d'un avion de ligne (altitude voisine de 8000 m), depuis l'aplomb du Mont Charvin

L'alignement bien ordonné des sommets du chaînon des Aravis (en premier plan) contraste avec l'organisation plus confuse du Haut Giffre.
Ce dernier se profile devant la grosse dorsale des massifs "helvétiques" de Suisse, qui débutent par celui de Morcles-Diablerets pour culminer dans l'Oberland bernois.

L'extrème marge orientale du Chablais apparaît à gauche.

  version plus grande, sans commentaires géologiques, de cette image

Du côté oriental l'abrupt de ce crêt tombe en général sans rupture de pente jusqu'à la bande de replats herbeux déterminée par les Terres Noires, ici peu épaisses. La barre tithonique fait cependant saillie localement, au point de former des sommets secondaires, à La Miaz et aux Quatre-Têtes.

Panorama du revers oriental du chaînon des Aravis
vu du nord-est, depuis le sommet de Croise Baulet. version plus grande, muette, de cette image

La structure est remarquablement simple et se limite à le succession stratigraphique des couches, sauf le long de la crête secondaire du col de Niard où le Tithonique est redoublé dans la montagnede la Miaz.

Du côté de son revers nord-ouest c'est le plus souvent le Néocomien argilo-siliceux (Hauterivien - Valanginien) qui forme la ligne de crête tandis que l'Urgonien n'affleure que sur les crêtes secondaires qui en descendent vers l'ouest.
En effet plus on va vers le sud, plus cette dalle urgonienne est largement entaillée de cirques allongés ouverts du côté du nord-ouest, qui disséquent de plus en plus profondément son soubassement de Néocomien argilo-siliceux, ouvrant des vallons colonisés par les installations de la station de ski. Le contraste entre le fond, relativement plat, de ces vallons et la raideur des abrupts qui les encadrent ("profil en U") montre bien qu'il s'agit là d'anciens cirques glaciaires (d'âge würmien).

Le versant ouest des crêtes des Aravis, au nord du col
vu du nord-ouest, depuis le sommet du Mont Lachat de Châtillon version plus grande, muette, de cette image
L'Urgonien "grimpe à l'assaut" de la crête principale en formant l'ossature des crêtes secondaires qui séparent les anciennes vallées glaciaires, dont le fond est creusé, jusque très bas, dans l'Hauterivien (les flèches symbolisent la position de la langue du glacier, dans son ombilic* frontal).
Ces crêtes et vallons secondaires sont coupés transversalement par la faille de la Pointe Percée (f.PP). La faille de la Grangeat (f.G) passe plus bas, au débouché des vallons, et coupe en biseau le contact stratigraphique entre Nummulitique et Sénonien.
a.MD = anticlinal du Mont-Durand (que coupe, plus à l'ouest, c'est-à-dire plus à droite, la cluse de La Clusaz)

L'ablation de la carapace urgonienne est telle, sur la crête principale, que, au sud du Mont Charvet, l'Urgonien n'affleure même plus que dans la partie basse des crêtes secondaires, NW-SE, qui limitent ces cirques. Dès le Mont Fleuri il ne constitue même plus que les arc-boutants par lesquels ces crêtes viennent se terminer dans la dépression de La Clusaz. Cette tendance va s'aggravant jusqu'au niveau du lac des Confins (vallon de la Petite Torchère). Cependant elle tend à s'inverser ensuite au fur et à mesure que l'on se rapproche du col des Aravis où la dalle urgonienne rejoint presque la crête faitière.

Compte tenu de ce que l'altitude des sommets de la crête faîtière ne varie que peu et avoisine partout celle de 2500 m, on ne peut guère mettre cette variation du comportement de l'érosion sur le compte d'une variation de la profondeur moyenne qu'aurait atteint l'érosion en entaillant les vallons du versant ouest. Il paraît plus vraisemblable d'envisager que les portions supérieures des crêtes secondaires (NW-SE), taillées dans l'Hauterivien, correspondent à des témoins du niveau atteint par un aplanissement antérieur au creusement de ces vallons (selon un processus reconnu dans les chaînons subalpins plus méridionaux)

La plus méridionale de ces combes transverses au chaînon, plus profondément entaillée que les autres débouche du côté sud-est sur les pentes moins abruptes du Berriasien-Valanginien, où se trouve le col des Aravis. Cette entaille ne correspond à aucun accident tectonique : elle a peut-être été créée par le passage d'un ancien cours supérieur du Borne, qui se serait encaissé dans la traversée de cette barrière rocheuse, en s'écoulant depuis des reliefs occupant anciennement l'emplacement du val de l'Arly (ces reliefs ont été depuis arasés puis transformés en combe monoclinale par le creusement du lit de cette rivière).

Aux abords septentrionaux de la Pointe Perçée la dalle urgonienne qui arme le crêt a été moins largement crevée par l'érosion : elle y est au contraire dénudée en une dalle structurale* ciselée par un vaste lapiaz, d'une blancheur quasi-neigeuse.

Le versant occidental de la moitié nord du chaînon des Aravis septentrional
vue d'avion, prise de l'ouest version plus grande, muette, de ce cliché
Le chaînon des Aravis septentrional, armé de calcaires urgoniens, est pris en sandwich entre le socle cristallin du massif du Mont-Blanc (il en est séparé par la très large combe monoclinale de Megève - Saint-Gervais), en arrière-plan, et les nappes des Préalpes, représentées par les sommets herbeux de la klippe* des Annes, en avant-plan (leur surface de chevauchement, en partie masquée, est notée ØM).

L'extrémité nord du chaînon de la Pointe Percée

vue du nord-est, depuis les pentes du col de la Golèse (Chablais) version plus grande, muette, de cette image
Les pentes boisées de la station de ski de Morillon (échine nord-ouest de la Tête des Prés-les-Saix) cachent la vallée de l'Arve. Elles sont formées par une klippe* des Préalpes médianes* reposant sur un coussin d'ultrahelvétique*.
Le redoublement de la barre tithonique, qui résulte du chevauchement d'Areu (ØA), est mieux visible sur des clichés pris de l'est. f.G = faille de la Grangeat (sectionnée et transportée par le chevauchement d'Areu). ØM = surface de chevauchement des Préalpes médianes.

Dans la partie la plus septentrionale du chaînon (qui tombe sur la cluse de l'Arve) le crêt urgonien fait au contraire place à une échine herbeuse accidentée de buttes et de dépressions qui est due à ce que l'Urgonien y a gardé son manteau de Sénonien et de Tertiaire. Ces terrains y sont respectés par l'érosion parce qu'ils ont été abaissés, par rapport à l'Urgonien de l'arête Pointe Perçée - Pointe d'Areu, par le jeu d'un système de failles combinant la faille extensive ancienne de la Grangeat et le chevauchement d'Areu.

Sur le revers oriental du chaînon, du côté drainé par l'Arve au nord et l'Arly au sud, les couches de la partie moyenne de la succession stratigraphique (Hauterivien à Tithonique inclus) déterminent une ligne de talus et de replats à flanc de versant, comparable à ceux des Petites Roches en bordure du Grésivaudan. Mais la succession est troublée en deux endroits (la Miaz et les Quatre-Têtes) par des failles plates, de chevauchement, qui y occasionnent le redoublement de la barre tithonique. Une troisième faille plate très analogue s'observe, plus bas dans l'édifice structural, dans la gorfe de l'Arve (elle redouble l'Urgonien dans les falaises dominant le village de la Tour Noire, en face d'Arâches).
Plus à l'est les couches de la partie basse de la succession (Terres Noires à Lias) affleurent en donnant un fouillis de collines sans organisation apparente. Leur structure est en fait régie par un système de plis couchés multiples (mais de faible flèche) qui se combinent également avec le jeu de failles plates de chevauchement. Ces dernières prolongent en fait celles de la barre tithonique et provoquent des intrications entre Terres Noires et Dogger calcaire (Bajocien). Ces cassures trouvent leur prolongement exact sur la rive opposée de l'Arve dans les pentes occidentales du massif de Platé, où ces structures sont plus faciles à voir et à analyser.



Schéma perspectif très simplifié des Aravis septentrionales
montrant, très schématiquement, leurs rapports avec les secteurs voisins. figure agrandissable
Les hauteurs sont un peu exagérées, pour mieux schématiser les contrastes de pente entre les différents secteurs, et les terrains des nappes d'origine interne ne sont pas représentés.
Noter particulièrement le système des failles plates (peu inclinées par rapport aux couches) qui affectent tous les termes de la série stratigraphique entre l'accident médian de Belledonne et le synclinal de Serraval (on ignore dans quelle mesure ce système se poursuit, dans la profondeur de la succession des couches, sous ce synclinal). Il est très évident qu'aucun des chevauchements de ce secteur ne peut être en rapport avec un supposé "chevauchement de Belledonne" qui serait censé passer à l'aplomb ouest de Megève (pour ceux qui veulent y croire).


Le style tectonique de ce secteur, qui consiste en bandes plissées alternant avec des surfaces de chevauchement plates, est également celui qui régit largement, plus à l'est et plus bas dans la succession stratigraphique, la structure du Mont-Joly. C'est lui aussi que l'on retrouve, à des variantes près, dans le massif de Sixt.
Cette déformation par cisaillement de la pile de couches est certainement à mettre en liaison avec le déplacement vers l'ouest de la nappe de Morcles (dont le massif des Aravis constitue clairement le prolongement méridional), tangentiellement par rapport à la surface du socle cristallin du massif des Aiguilles Rouges.



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